à la Esteparia, chez
hermano Enzo
Depuis San
Pedro de Atacama
le 15 avril
(soit 10
jours après)
par Lu puis
Jeff
En partant
début septembre, peu de choses étaient fixées : on avait
beaucoup d'envies, les étapes du billet d'avion et puis c'est tout.
Il y avait
tout de même une escale qu'on ne voulait pas rater ni l'un ni
l'autre, aussi difficile soit-elle : retrouver Enzo, parti vivre
en Argentine depuis 16 mois. Il nous tardait terriblement de voir
comment il y vivait, ce qu'il y avait trouvé, comment il avait
changé. Et puis de le retrouver aussi !
Et puis, il
avait lancé l'invit', et nous on refuse rarement...
L'invitation
consistait en un plan dessiné, puis scanné et mis sur son blog avec
une photo d'un paysage vu de la route avec la légende « c'est
derrière les alamos ». (Alamos, on a découvert bien après
que c'étaient des peupliers...) Et un numéro de bus : « dites
au chauffeur que vous descendez à la tranquera azul celeste à 10km
après Piedra Parada ». (un portail bleu clair en pleine
cambrousse, donc...)
On trouvait
ça très flou et un peu fou, mais quand le cœur vous en dit...
Enzo était
parfaitement injoignable, puisqu'il vit dans une ferme à 50km du
village le plus proche et n'a ni électricité, ni réseaux divers et
variés.
Nous
n'étions pas sûrs qu'il aurait notre mail (l'avertissant quand-même
qu'on prenait la route ! ) ; et n'étions pas sûrs non
plus qu'il serait encore au même endroit : il a la fâcheuse
habitude de changer de lieu plus vite que son ombre... Et puis s'il
avait notre mail au dernier moment, c'est qu'il était parti en
ville, et ne serait donc pas là quand on arriverait...
Nous voilà
donc dans un bus de nuit pour partir de Santiago vers l'Argentine,
puis un second pour descendre en Patagonie, un troisième pour
s'arrêter à la dernière ville : Esquel. Après il fallait
prendre le collectivo (uniquement les jeudis selon son indication, ce
qui ne nous facilitait pas la tâche). Le chauffeur avait étonnamment
l'air de voir de quel portail bleu il s'agissait. (Tant mieux, nous
on ne l'aurait pas vu : il avait déteint depuis longtemps en
vieux gris délavé et se fondait parfaitement dans la broussaille)
Le chauffeur
roule, roule, et roule encore. On n'a aucune idée de quand ni où il
va nous déposer. Puis il finit par s'arrêter sur la route (une
immense route de poussière rectiligne sur des km genre Western), en
plein désert et nous dit de descendre. Pas de trace de la moindre
habitation à la ronde, juste la route, la poussière, la chaleur
éblouissante du désert...
« Euh...
Et vous repassez quand ? » « Dans 5h »... Nous
voilà rassurés... On a 2L d'eau, 2 pommes, on tiendra bien !
Nous prenons
donc nos clics et nos clacs (de 20kg chacun, quand-même, les clics
et les clacs...), passons la tranquera, marchons un bon quart d'heure
jusqu'à...
...une large
rivière...
Pas de pont,
pas de barque, juste de l'eau. Et toujours aucune habitation visible
de l'autre côté... Il nous semblait bien nous rappeler qu'il
parlait d'une rivière qu'il avait passé à gué dans son blog, donc
on ne se décourage pas encore... On pose notre barda, on change de
pompes, tout le monde en petite tenue et allez hop ! On teste le
terrain et on trouve un endroit où l'eau n'arrive qu'à mi-cuisse...
On recharge
le tout, et c'est beaucoup moins facile avec le courant quand on a
20kg sur le dos... On a largement le temps de penser à l'effet de
l'eau sur l'ordinateur, le passeport, les téléphones, etc... Mais
personne ne tombe ! On s'envase bien les chaussures mais c'est
tout !
Nous voilà
donc toujours en pleine steppe, mais de l'autre côté de la
rivière...
On a dû
bien tourner 30min de plus avant de trouver une maison. On s'approche
(on se rhabille aussi...) On ne sait même pas si on doit chercher un
hameau, une tente, une yourte ou une cabane. On ne sait pas non plus
si Enzo y vit en Hermite ou en communauté !
On voit une
fille à la fenêtre, on se rapproche encore...
Et on voit
Enzo !!!
Notre grand
Enzo, devenu tout barbu !
Il n'avait
pas eu nos mails et ne savait pas que nous venions ! Je vous
laisse imaginer sa tête...
« Non !
Vous êtes venus tous seuls ?! J'arrive pas à le croire ?!
(Merci Enzo...) C'est incroyable, c'est génial », et tout et
tout...
Il était
bien là, ses yeux pétillaient toujours autant de malice (encore
plus?), il n'en revenait pas (nous non plus ! ), et... Il était
accompagné d'une jolie Argentine : Sylvia !
Ensuite le
reste est tellement simple et bon, que j'aurais du mal à le
raconter...
Nous avons
passé une douzaine de jours à partager la ferme et la vie avec eux.
La « chacra » (ferme ? Domaine ? Propriété?)
faisait plusieurs milliers d'ha, nous ne nous marchions pas sur les
pieds !
Nous
avons...
ramassé et
coupé du bois,
fait du pain
au four à bois,
appris
l'espagnol argentin (qui remplace tous les « ll » et
« y » par ch!!! « cho me chama Camicha y me
gusta el amaricho» par ex),
monté
quelques murets d'adobe dans le potager,
marché,
ramassé et
trié plein de pommes,
lu,
dormi,
disserté
sur la purge hépatiques, le néo-hippisme, les respiratoriens, le
spiritualisme et les ovnis,
gratté la
guitare,
feutré la laine,
chanté au
tour du feu,
fait du stop
pour partir à la ville au ravitaillement (non les tontons, je vous
vois venir : le stop était sans danger ici... Pas de sentier
lumineux, que des sympas gauchos un peu bourrus. Et puis, il fallait
bien manger !) en re-traversant la rivière en canoë cette
fois-ci, sacs _vides puis très très pleins_ sur le dos ,
joué aux
cartes,
fait des
confitures,
appris à
cuisiner végétalien,
rit,
médité
devant la beauté du Monde...
Toutes ces
petites choses simples de la vie qui font le bonheur !
Mais qui
sont si difficilement racontables...
C'était
tellement bon !
Juste être
ensemble (quand on en avait envie), partager tout et rien, être
« ici et maintenant » et puis c'est tout.
Quel
bonheur...
On en est
encore tout remués de s'être senti si bien, si détendus, isolés
au milieu de nulle part, dans ce petit (pas si petit ! )
Paradis.
On aurait
quand-même bien aimé pouvoir rassurer les nôtres qui, malgré
toutes nos recommandations, devaient commencer à s'inquiéter... (il
paraît que certains d'entre vous ont eu un mal fou à les
réconforter pendant tout ce temps-là... ). Mais seulement 2
collectivos par semaine ; le weekend de Pâques ; et notre
envie de nous éterniser ici, ont fait que nous sommes restés un peu
plus que prévu !
Nous avons
posé nos valises et nos cœurs ici, comme si nous devions y rester
toute une vie ! Et on en avait un paquet de choses à poser,
après toute ce périple ! On avait bien besoin de prendre du
recul sur tout ça et sur le retour, ça tombait à pic (c'est
toujours « le bon moment » décidément ! ).
Lu
Lu oublie de
dire qu'on a aussi fait des bonnes petites randonnées, et qu'on a
atteint un haut niveau de compétence dans l'allumage de feu de bois.
Après 2
semaines de simplicité, nous sommes repartis vers de nouvelles
aventures, avec un peu le bourdon quand même. Il nous a fallu
ré-affronter les tourments de la civilisation. Même El Bolson, qui
est pourtant une ville fortement influencée par la culture hippie,
nous a paru bruyante et trop agitée.
Les
expériences de voyage continuent et on verra ce que l'on en fait une
fois revenue en France.
JF
Les paysages autour de la Esteparia :
La Chacra est juste à droite, près de la rivière |
Notre première fournée de pain |
Le four à bois (et Flaky) |
Il est pas beau notre pain??? |
Enzo est visiblement aussi étonné que moi : Jeff coupe du bois à la hache comme s'il avait fait ça toute sa vie... (photo réalisée sans trucaque ;-) ) |
Sylvia sirote son maté |
Petit dej' royal... |
Voici le menu :pain frais maison, confitures et muesli maisons aussi, fruits du jardin... Et vue imprenable sur le canyon. |
Les animaux de la Esteparia :
Le p'tit tatou qui niche dans le tas de compost |
Flaqui le p'tit boulet |
Negro |
Flaqui qui nous guide dans les canyons (et qui porte la Lune! ) |
Pato et Patito (ainsi rebaptisé après coin pouët Jr ) |
Photos en vracs :
Sous-Wwoofing (comme quand on sous-loue, Enzo sous-wwoofe avec nous) dans le potager |
Enzo décide de raser sa barbe... On retrouve le parisien...
Lever de (pleine) Lune avant le feu de camp |
Les grimpeurs noteront la Hight-line en haut du cayon ! (pour y faire une sorte de funambulisme extrême) |
y a un joli surplomb et un grimpeur derrière la vache |
AU bout du canyon, la fameuse Piedra Parada |
C'est ce qui s'appelle en prendre plein la vue !
RépondreSupprimerJ'étais tellement dedans que j'ai fait cramer mon pain dans le four...
Je crois effectivement que vous étiez dans une expérience et des moments indicibles. Alors je ferme ma ...
Plein de bises, savourez, et profitez-bien de Sandie !!!
Complètement d'accord avec Delphine !
RépondreSupprimerComme vous chez Enzo, il nous faudrait arriver à ignorer les mesquineries et les mochetés ambiantes pour ne regarder que vers la lumière, les grands espaces, les êtres et les choses qui nous tirent vers le beau...
Vous nous faites un bien fou !
Je vous embrasse affectueusement tous les deux (et petite Choupette).
cela fait 3 fois que je lis ces commentaires et que je suis en extase devant ces photos et je rêve........
RépondreSupprimerMERCI
grosses quichades et profitez à fond sans oublier choupinette
j'avais bien besoin de lire de belles choses comme ça aujourd'hui! Merci les poulets!
RépondreSupprimermarionette toute émue